Djibouti : la diaspora de Belgique inflige une leçon de démocratie au régime djiboutien… et à l’USN !

Bruxelles 01.10.2014

Bruxelles 01.10.2014

Ce mercredi 1er octobre 2014, les militants en lutte contre la dictature en République de Djibouti ont exprimé leur mécontentement à Bruxelles. Depuis deux ans, alors que le régime mène une sévère répression et commet de graves violations contre les droits humains, le président Omar Guelleh promet de négocier le règlement pacifique de la crise politique qui secoue le pays. Si l’opposition djiboutienne (USN) veut encore y croire, les militants sont quant à eux de plus en plus sceptiques. Ils sont aussi lassés par l’attitude de certains leaders de l’opposition qui commencent à se perdre de manière trop visible dans des querelles d’ego et des rivalités internes susceptibles de nuire très vite à l’unité qui a fait leur force. Ainsi qu’à une crédibilité durement acquise, notamment grâce aux militants !

Le malaise est d’autant plus perceptible que la manifestation d’aujourd’hui à Bruxelles a été complètement niée par l’USN à Djibouti, une première qui n’augure rien de bon. À la stupeur générale, le député USN Ismael Assoweh, de passage à Bruxelles où son zèle en agasse plus d’un, s’est d’ailleurs abstenu d’y participer. Raison invoquée : « l’absence d’unité au sein de la diaspora ». Une version démentie par le succès rencontré par la manifestation d’aujourd’hui et qui a le don de rendre les militants furieux. Les trois activistes djiboutiens en grève de la faim depuis 6 jours à Bruxelles avaient en outre fait le déplacement. Du côté de la représentation officielle de l’USN en Belgique qui soutient pourtant activement les grévistes, on renvoie poliment vers le délégué de l’USN aux relations extérieures, Mr Djama Amareh Meidal. En attendant que la situation s’éclaircisse. Car si en off, les grévistes reçoivent de nombreux témoignages de sympathie, dans le discours officiel de l’USN, ils n’existent pas ! Et personne ne comprend pourquoi.

Quoi qu’il en soit, la base juge l’attitude de l’USN incompréhensible et, pour les plus virulents, parfaitement irresponsable. Une aubaine bien sûr pour le régime qui suit de très près ce qui se passe à Bruxelles. Et qui se met à espérer que sa stratégie – réprimer, corrompre et gagner du temps – porte enfin ses fruits. À cet égard, la manifestation d’aujourd’hui sonne comme un avertissement très clair adressé par les militants aux représentants de l’USN. La population djiboutienne a pris goût à la démocratie et elle entend bien le montrer, quoi qu’il en coûte.

Pour ACP, ce qui arrive aujourd’hui à Djibouti comme à Bruxelles était prévisible et ne doit pas effrayer. Au fil des mois, les démocrates djiboutiens en lutte contre la dictature ont compris qu’au sein de l’USN ils avaient affaire à deux courants. L’ancienne et la nouvelle opposition. L’ancienne opposition est notamment incarnée par ceux qui ont eu toute leur vie pour faire leurs preuves. Ou pas. La nouvelle opposition, c’est bien sûr celle qui mobilise, celle qui porte l’espoir de tout un peuple, celle qui est incarnée par quelques figures connues et d’autres que l’on n’attendait pas. L’ancienne opposition, ce sont d’anciens réflexes, la dernière chance d’entrer dans l’histoire à côté de laquelle on est passé et, dans le meilleur des cas, une occasion de racheter les bassesses et les compromissions d’antan. La nouvelle opposition c’est celle qui dérange vraiment. C’est l’opposition qui obtient des résultats, l’opposition qui dérange le régime et sort de son petit confort l’ancienne opposition de salon et de 4X4 climatisées. La nouvelle opposition ce sont les jeunes qui prennent les coups, ce sont ceux qui crèvent, ceux qui font preuve de courage, ce sont ceux que l’on enferme, c’est le MJO et c’est visiblement aussi Bruxelles qui fait tellement parler.

Comme c’est l’usage en pareilles occasions, le nouvel ambassadeur de Djibouti en Belgique, Mr Omar Siad, avait bien sûr été prévenu que des opposants djiboutiens organiseraient cette manifestation devant son ambassade. Peu habitué à la démocratie, l’ancien policier devenu ambassadeur s’y est fermement opposé : « Il est hors de question qu’une telle manifestation ait lieu devant chez moi » a hurlé le diplomate auprès de chacun des services concernés. « À Djibouti et dans votre ambassade, vous faites ce que vous voulez, une fois sur le trottoir, vous êtes dans un Etat de droit ! », lui a rétorqué un fonctionnaire passablement énervé par l’attitude outrancière du nouveau représentant de Djibouti en Belgique, comme le rapporte son collègue sous couvert d’anonymat.

À plus d’un titre, c’est donc bien la démocratie que les militants djiboutiens ont célébré aujourd’hui à Bruxelles. Puissent l’ancienne et la nouvelle opposition en prendre conscience et en tirer avec sagesse tous les enseignements. Il n’est jamais trop tard.

Dimitri Verdonck, Président d’ACP asbl

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