Djibouti : Le Ministre des Affaires Etrangères Didier Reynders répond au député Benoît Hellings

Djibouti Question Fed

Didier Reynders, Benoît Hellings, Ali Deberkale, Aïcha Dabalé

Ce mercredi 25 mai 2016, le député fédéral Benoît Hellings a interpellé le Vice-Premier Ministre et Ministre belge des Affaires Etrangères, Didier Reynders, sur les viols impunis commis en République de Djibouti. Retrouvez ici leur échange Didier Reynders / Benoît Hellings

 

Chambre des représentants – Commission des Relations extérieures Réunion du 25 mai 2016 – Extrait du compte rendu intégral (CRIV 54 – COM 0429)  

Question de M. Benoit Hellings au vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères et européennes, chargé de Beliris et des Institutions culturelles fédérales, sur « le soutien à apporter aux femmes de Djibouti qui luttent contre l’impunité de crimes de viol » (n° 11316)

Benoit Hellings (Ecolo-Groen) : Monsieur le ministre, le 25 avril dernier, dix femmes djiboutiennes ont commencé une grève de la faim pour dénoncer l’impunité des viols à Djibouti. Elles ont été violées par les soldats de l’armée gouvernementale, parfois devant leur propre famille. Ces viols ont lieu spécialement envers les Afars, dans les zones où l’opposition est active. Aucun de ceux-ci n’a été puni jusqu’à présent, le régime niant même ces exactions.

Ces femmes vivent en Belgique. Certaines sont demandeuses d’asile, tandis que d’autres ont déjà leur statut de réfugiées reconnu. Elles souhaitent être entendues chez nous, soutenues par le pays qui les accueillent et par le Parlement européen. Elles demandent, en effet, une enquête internationale sur la situation qu’elles et d’autres femmes ont subie et subissent encore là-bas. Le pouvoir djiboutien réfute, jusqu’à présent, tout viol.

Monsieur le ministre, avez-vous pris connaissance de cette situation? Nos postes diplomatiques dans la région et en charge de Djibouti ont-ils réagi? On sait que la Belgique – en particulier, sous l’égide de la Défense – et Djibouti ont longtemps collaboré à la mise en œuvre de l’opération Atalanta. Un contact formel ou informel est-il prévu prochainement entre votre homologue djiboutien et vous-même afin d’aborder cette affaire? Enfin, envisagez-vous de saisir notre représentant pour faire intervenir le Conseil des droits de l’Homme sur cette question délicate?

Didier Reynders, ministre : Monsieur Hellings, le président djiboutien Omar Guelleh a été, comme la Constitution djiboutienne le lui permet, réélu pour un quatrième mandat de cinq ans le 8 avril dernier. Djibouti demeure un allié fidèle de la communauté internationale en matière de lutte contre le terrorisme dans cette région fort instable de la Corne de l’Afrique.

L’opposition et les ONG spécialisées dans la défense des droits de l’Homme dénoncent régulièrement les restrictions des libertés publiques dans le pays.

J’ai bien pris connaissance des faits que vous évoquez. Selon mes informations, et contrairement à ce qu’il s’est malheureusement passé dans les années 1990 au cours de la guerre civile à Djibouti, il n’y aurait actuellement pas de recours systématique à la violence sexuelle à l’encontre des femmes dans la région Afar. Cependant, des cas isolés de viol sont effectivement rapportés.

Je n’ai pas de contact prévu dans les prochaines semaines avec des représentants du gouvernement djiboutien. Toutefois, je compte demander à notre ambassadeur à Addis-Abeba, également accrédité à Djibouti, que la question du respect des droits de l’Homme soit explicitement abordée lors de la prochaine réunion des chefs de mission européens avec les autorités de Djibouti, dans le cadre de l’article 8 de l’Accord de Cotonou.

L’espace de liberté pour les associations de soutien médical, psychologique et juridique aux victimes constitue, en outre, un point important qui devrait aussi être inscrit à l’agenda ce, d’autant plus que les victimes sont bien souvent des femmes illettrées et vivant dans des régions reculées.

Je demanderai, par ailleurs, à notre directeur Afrique d’aborder cette question avec l’ambassadeur de Djibouti basé à Bruxelles.

De manière générale, la lutte contre l’impunité des violences faites aux femmes est une priorité pour notre pays. Nos représentants dans les enceintes internationales ne manquent pas d’aborder cette question chaque fois que l’occasion se présente.

Nous sommes très soucieux de voir organisée, dans quelques pays, pas seulement à Djibouti, la collecte d’informations précises sur les faits qui ont été commis. C’est la seule façon de pouvoir, ensuite, mettre en oeuvre des procédures visant à éviter toute impunité, ce qui est un des deux axes. Nous avons d’un côté la lutte contre l’impunité, mais de l’autre, nous avons le soutien aux victimes.

Benoit Hellings (Ecolo-Groen) : Monsieur le ministre, je vous remercie pour votre réponse. Nous attendons évidemment beaucoup des initiatives que prendra l’ambassadeur de la Belgique à Addis Abeba et de vos services à Bruxelles par rapport à l’ambassadeur de Djibouti. Comme vous l’avez dit, Djibouti est un allié diplomatique et militaire. J’espère donc que ce statut spécial pourra faire entendre raison aux autorités à Djibouti, pour faire avancer ce dossier.

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